Au moment où le monde agricole se mobilise de nouveau pour dire ses difficultés et attirer l’attention de l'opinion publique sur ses fragilités, nous regrettons le flou de la politique agricole de la Région Bretagne.
Le seul objectif chiffré annoncé par l'exécutif, c'est "1000 installations par an en Bretagne" pour assurer le renouvellement des générations. Or, nous en sommes loin. En 2023, il y a eu 432 installations aidées dans l'agriculture bretonne … Parmi celles-ci, on compte une grande diversité de modèles qui d'ailleurs ne s'avèrent pas toujours économiquement viables.
Le constat : -2.4 % de vaches laitières de 2022 à 2023 en Bretagne, 380000 porcs de moins abattus de 2021 à 2022, - 8% de la production d'œufs et -6.6 % de viande bovine de 2021 à 2022. Que fait la Région face à la baisse du cheptel, matière première de nos industries agroalimentaires ? Elle commande une étude à Jean-Marc Jancovici et à son association, The shift project, qui préconisent des “orientations plus structurelles comme la baisse du cheptel” et des “trajectoires proposées sous des hypothèses de 20 % de réduction de tête de cheptel en 2050 vis à vis de 2022.” Suicidaire !
Que fait la Région pour permettre la diversification des activités des exploitations agricoles ? Elle cesse de soutenir les projets de méthanisation à la ferme, qui permettent pourtant de réduire les coûts d’énergie dans certaines exploitations tout en procurant un revenu complémentaire aux éleveurs.
Depuis des années, que nous disent les agriculteurs ? Moins de paperasse, moins de contraintes ! Que fait la Région Bretagne ? Des appels à projets, c'est-à -dire l'obligation de payer des cabinets externes pour constituer des dossiers de candidatures qui n’offrent aucune garantie d’être retenus.
Plus que des discours, la situation impose de lancer un véritable plan de compétitivité pour l'élevage en Bretagne. Cela passe par du foncier accessible financièrement, des bâtiments plus performants, plus efficaces contre les épizooties, mieux adaptés au changement climatique. Amélioration des conditions de travail, promotion des métiers, et surtout meilleur partage de la valeur entre les producteurs, les transformateurs et les distributeurs, sont autant d'objectifs qui nourrissent les discours, mais qui, hélas, ne trouvent pas de traduction concrète.
En Europe, sur 9,2 millions d’agriculteurs, près de 3,3 millions sont Polonais ou Roumains (source 2022). La concurrence déloyale est vive, à l'image des importations de poulets ukrainiens. Alors oui, nous nous retrouvons tous en France pour que le traité de libre-échange avec le Mercosur ne soit pas adopté. Il y va de l’avenir de la production de viande bovine ou de poulet en Bretagne. Mais il faut aussi se battre contre les agressions permanentes dont sont victimes les agriculteurs, pour le renouvellement des générations et la compétitivité de l'ensemble de la filière. En Bretagne, près de 70000 actifs travaillent dans les 25000 exploitations tandis que 75000 salariés de l’agro-alimentaire vivent de leur travail, soit 41% de l’emploi industriel breton. A quand un plan volontariste en Bretagne, singulièrement, en faveur de l'élevage ?
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